Le temps en bandoulière
Laisse des années lumière
taille de guêpe
poudroiement de quelques romances
sur feuilles mortes d'automne.
Rassembler les soirs de frime
en faire un feu pour la rime
augure du vent venant
la chansonnette de l'instant.
De fines coulures d'esprit
font solides échardes
sur le cuir des souvenirs
le rire en cale sèche.
Brille au doigt de ma mère
la lourde chevalière
d'or et d'un rubis affublée
mémoire de Saint-Nazaire.
Dans le désert jappent les fennecs
aux dunes d'avenir le refrain
d'un pain sorti de la panière
de rotin chanfreinée.
Flanelle ajourée
romance des soirs d'été
dansent sur la margelle
les lutins de la fontaine.
Sous l'unique lampe
l'eau de vaisselle refroidie
mains dans l'écume jaunie
les doigts en parousie.
Tranches fines
le passé se débite
heurtant comme à l'accoutumé
le clapet des remontrances.
Il n'est que de vivre seul
d'une pincée de sel
du rivage à la dune
s'efface la trace de l'enfance.
Visage las
les traits tirés par le sourire
accrochés sur la patère
les habits mouillés de la veille.
Des entrées souterraines
vers l'escalier et que la porte grince
tinte le pas lourd du grand-père,
s'éteignent les violons.
Vitrail des pluies dégoulinantes
à grand renfort d'un souffle rauque
s'emplie la maisonnée
d'ordres et de contre-ordres.
Coquille écrasée devant l'entrée
poules piaillant d'aise
en ribambelle sont montées du Pradou
les bacchantes de juillet.
Serrant contre soi
l'agneau de la veille
avons comparu devant l'avaloir
en innocence de toute souffrance.
Grimpant à la cime du frêne
agitant l'ombrelle de la feuillée
elles ont rempli les seaux de zinc
d'un lait aux rides poisseuses.
Remonte peu à peu
de l'encoignure le frisson
des étoiles au sortir le soir
d'une camisole de sueur séchée.
Sur la route dans la flaque d'eau
les bateaux de liège
frisent leurs moustaches
de fin de fête.
Echos noués par la froidure
les doigts gourds la bouche sèche
avons rempli de petits bois
la toile du grenier.
Rencontre singulière
dans la courbe de Rezentières
au bas côté des sentiments
avons planté Hermann Hesse.
Avons vécu serons vécu
images et sons
brinquebalant la cargaison
du bien aimé toute honte bue.
Fermez le ban
recouvrez l'esprit de famille
le temps brûlant les planches
d'une fin de représentation.
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